Portrait Memento de Sabine

{ Portrait de Sabine }

Portrait réalisé lors d'un atelier au M33 à Strasbourg, en mai 2020. L’association Les Petites Roues collecte des denrées alimentaires, prépare et distribue des repas pour les sans-abris à Strasbourg, ainsi que des vêtements pour les personnes en situation précaire.

#memoiredeconfinement #noublionspas #veillesociale

{ Réveil }

POURQUOI AI-JE CHOISI LE MOT "Réveil " ?

Notre association a vécu cette crise en 3 temps : « inquiétude » puis « réveil » et enfin « désenchantement ». 17 mars, midi, 1er jour de confinement, soudainement les rues de Strasbourg sont désertées. Nous décidons d’intensifier nos actions sur le terrain, au vu des besoins. Des décomptes macabres tous les soirs dans les médias, des personnes perdues, qui ont faim à cause de la fermeture soudaine des structures d’accueil. De l’émerveillement à entendre le bruit des oiseaux dans une ville vidée de ses tourismes ? non. Juste une période sombre, un sentiment d’apocalypse où tout est figé et suspendu. Les personnes à la rue se sentent abandonnées et sont très inquiètes. Les questions fusent, nous n’avons aucune réponse. Le confinement, un moment ascétique, un retour sur soi ? non. Un élan de générosité et l’émergence d’une solidarité apparaissent, avec de nouveaux collectifs qui s’organisent, une boite mail remplie de propositions de bénévolat et beaucoup de personnes prêtes à s’investir et à cuisiner pour nous. Cette crise sanitaire redonne du sens. Le souci de soi est présent mais surtout le souci de l’autre. Des petites taches qui, on l’espère, en s’accumulant vont finir par provoquer un changement.

QUELLE EST MA VISION DE LA CRISE ACTUELLE ?

Finalement, ce virus n’est pas un message. Va-t-on mettre en place un nouveau modèle de société ? non. Cette crise ne sera pas une opportunité pour changer le monde. Ce virus n’a rien produit d’inédit. Depuis trois semaines, les places en hébergement d’urgence sont figées car je cite « faut déjà replacer les personnes qui ont été mises dans les hôtels ». Du coup, pas de place pour ce mineur que nous avons croisé lundi soir à la gare. Samedi, nous croisons un enfant de 12 ans, qui fait la manche, seul, rue du maire Kuss. Nous sommes sidérés et en colère. Pourquoi avoir choisi « réveil » ? Parce ce qu’il faut surmonter ce désespoir, en faisant ce métier d’homme et transformer cette culpabilité en capacité d’agir. Ne pas conserver ce monde ni le révolutionner, juste le réparer. C’est ce que nous tentons de faire, à notre échelle, avec modestie et sans résignation.

Sabine

Portrait réalisé le 20 mai 2020